Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/188

Cette page n’a pas encore été corrigée

rêveries tendues qui attristent et épuisent, « les débandements d’imagination et les relâchements de gaîté » ; à la religion spéculative, la religion d’action. « Vous ne pouvez pas avoir de plus mauvaise compagnie que vous-même, répète-t-elle dans ses Lettres édifiantes ; sortez de votre intérieur ; soyez à tout le monde, au lieu d’être à vous seule ; ne vous abîmez point dans des bagatelles, et faites bonnement ce que vous avez à faire. Les devoirs d’état sont la véritable piété. Il n’y a point de haire ni de cilice qui vaille une occupation régulièrement remplie. Un retranchement de réponses sèches, fières et rudes, un sincère abandon au bien d’autrui vaut mieux que tous les jeûnes et que tous les appétits de perfectionnement déraisonnable. Une médecine donnée dans l’obéissance suivant votre charge, dans l’apothicairerie, vous sera plus utile et meilleure qu’une oraison hors d’œuvre, et c’est ce bon esprit-là que je voudrais établir dans la maison. »

Toutes les maîtresses n’étaient pas en état de recevoir le même conseil de la même façon. À l’origine surtout, les Dames étaient de provenance et de complexion très diverses. Mme de Maintenon prenait le ton avec chacune d’elles : avec Mme de Saint-Pars dont l’esprit un peu lourd, même dans la subtilité, n’était guère fait pour quitter terre, comme avec Mme de Bouju, sa chère Jaune, dont l’esprit éthéré n’avait jamais fait que deux élèves, devenues folles par excès de scrupule ; avec Mme du Radouay, intelligence fine qui aimait à se rendre compte par le menu, comme avec Mme du Veilhan, âme vaillante qu’exaltaient les bulletins de campagne. Parmi les maîtresses de la première époque, quelques-unes s’étaient particulièrement attiré son intérêt :