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garder de concevoir des illusions sur leurs talents, de s’attribuer des mérites qu’elles n’avaient point. Mme de Maintenon qui, dans les voyages où elle suivait le roi, se faisait envoyer les notes, surtout celles des jaunes et des bleues, exigeait qu’elles fussent toujours exactes et que les intéressées les connussent. Si on lui adressait quelque composition, elle flairait les corrections et les retouches. Elle en riait quelquefois : « Je voudrais bien savoir combien de brouillons ma sœur de Rony a faits et qui lui a tenu la main ; car Solar (c’était une élève qu’elle avait prise pour secrétaire) me rend fort défiante des beaux ouvrages de ces demoiselles » ; elle s’en fâchait le plus souvent : elle ne voulait pas de ce qu’elle appelle une éducation extérieure et de secours. C’est le fond qu’elle demande qu’on attaque et qu’on montre, le fond avec ses imperfections, mais avec sa probité, le fond qui ne trompe personne, ni les autres, ni soi.

Toutes ces vertus professionnelles pouvaient tirer du sentiment de l’abnégation religieuse une partie de leur force ; mais ce sentiment devait, comme les autres, rester simple, sage, sans emportement ni subtilité. De tout temps le danger avait été dans les excès de zèle. Il s’était accru après la transformation de l’institution en monastère. L’invasion des idées de Mme Guyon l’avait rendu menaçant. C’est une dame de Saint-Cyr qui avait introduit « les nouveautés, » Mme de la Maisonfort, fort goûtée d’abord de Mme de Maintenon, chez qui l’habitude d’une discrétion voulue n’avait jamais complètement amorti la promptitude à la confiance. Mme de la Maisonfort avait été bientôt éconduite ; mais tout l’esprit du quiétisme n’était pas sorti