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réalité, ses conseils sur le mariage sont généralement pénétrés d’un sentiment plus doux. « Soyez, écrit-elle à une de ses préférées en lui envoyant son cadeau de noce, soyez une bonne dame de campagne, bonne chrétienne, bonne femme, bonne fille, bonne mère, bonne maîtresse… : vous ne serez heureuse que par là ; mais par là vous serez heureuse. » Idéal modeste, mais paisible et honnête, de la vie de petite noblesse provinciale telle que la comprenait Fénelon, telle qu’elle l’avait elle-même connue dans son enfance et auquel, à en juger par les résultats, l’éducation de Saint-Cyr répondait pleinement. Dans un de ses jours de sévérité, Mme de Maintenon, se plaignant de la corruption du siècle, disait qu’il y avait peu de jeunes filles de vingt ans dont le monde n’eût parlé, tandis que, comme elle le reconnaît elle-même, on recherchait les pensionnaires de Saint-Louis pour leur solidité.

Cette vie de devoir tout uni n’excluait pas d’ailleurs les sentiments larges et généreux. La discipline de Saint-Cyr, même après la réforme, n’avait rien de la reclusion. Mme de Maintenon, racontant un de ses voyages à son frère, se moquait agréablement « des badaudes de Paris qui avaient trouvé le monde grand dès qu’elles étaient arrivées à Étampes » ; et, toujours conduite par ce principe, que les demoiselles étaient destinées à vivre à ciel ouvert, elle ne faisait pas difficulté de les habituer à une certaine liberté ; elle les laissait aller dans le village assister les affligés, consoler les malades, donner un bouillon à l’un, refaire le lit de l’autre ; elle voulait « qu’on attirât à soi ceux qui souffrent jusqu’à leur donner, quand il était possible, l’hospitalité. » Bien plus, elle avait sur le rapprochement des classes sociales