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leur en conserver l’illusion. On avait retranché de l’uniforme, d’une distinction sobre et gracieuse, tout ce qui aurait pu lui donner un air monacal, et l’on n’y ménageait ni les choux ni les rubans ; on ne s’appelait ni ma sœur, ni ma mère ; les usages de la vie ordinaire étaient respectés. L’instruction s’inspirait du même esprit. « Il fallait que les demoiselles ne fussent pas si neuves quand elles s’en iraient, que le sont la plupart des filles qui sortent des couvents, et qu’elles sussent des choses dont elles ne fussent point honteuses dans le monde. » On leur faisait faire entre elles, touchant leurs principaux devoirs, des conversations ingénieuses composées exprès ou qu’elles composaient elles-mêmes sur-le-champ ; on les exerçait à parler sur les histoires qui leur avaient été lues, à réciter par cœur les meilleurs poètes ; et Mme de Maintenon répétait avec conviction : « Ces amusements sont bons à la jeunesse, ils donnent de la grâce, ornent la mémoire, élèvent le cœur, remplissent l’esprit de belles choses. » Elle avait apporté une sorte de coquetterie littéraire jusque dans la rédaction des constitutions. La formule en avait été préparée par Mme de Brinon. Après s’être assuré de l’agrément du Père La Chaise et de l’abbé Gobelin, on l’avait soumise à Racine et à Despréaux, et Mme de Maintenon leur avait fait recommander « de ne pas gâter les expressions et les pensées par trop de pureté de langage. » « Vous savez, disait-elle, que dans tout ce que les femmes écrivent, il y a toujours mille fautes contre la grammaire, mais, avec votre permission, un agrément qui est rare dans les écrits des hommes. » Rien ne lui paraissait trop exquis pour élever les demoiselles « chrétiennement, raisonnablement