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concerté. Tous ses desseins sont à courte vue. Elle avait conduit sa vie au jour le jour admirablement et de façon à être toujours en mesure de saisir l’occasion, mais sans faire autre chose que de ne rien négliger de ce qui pouvait l’aider à naître ; même pour Saint Cyr, elle n’arriva à la complète réalisation de sa pensée que grâce aux circonstances et par degré.

Il est vrai que Louis XIV s’adressait à elle volontiers : « Consultons la Raison, disait-il. Qu’en pense Votre Solidité ? » On ajoute qu’il se plaisait à travailler dans sa chambre. Mais on sait aussi qu’elle ne participait pas aux délibérations du conseil et se tenait à l’écart. Garder le foyer, continuer l’éducation des princes, faire celle de la jeune duchesse de Bourgogne, relever dans ses défaillances passagères et amuser Louis XIV, c’est en cela que consistait son véritable rôle. Non qu’elle fût indifférente aux questions qu’elle entendait traiter : elle était passionnée pour la grandeur du roi, qu’elle ne séparait pas de la grandeur de la France. Mais, pour elle comme pour tout le monde, Louis XIV restait le maître, et d’un bout à l’autre de son règne la politique qu’il suit porte en effet la marque d’une incontestable unité. Par une influence intime et toute domestique, Mme de Maintenon put dans certaines conjonctures diriger ses choix : eût-elle vraiment osé combattre ses vues, sauf lorsqu’il s’agissait de la misère du peuple, dont elle était particulièrement touchée ? Voltaire nous semble avoir établi la vérité dans sa mesure lorsqu’il la dépeint « ne s’empressant jamais de parler d’affaires d’Etat, rejetant bien loin tout ce qui avait la plus légère apparence de cabale, beaucoup plus occupée de plaire à celui qui gouvernait