comme si rien n’eût été changé dans sa vie. Les témoignages de respect exagéré l’étonnaient presque et parfois l’impatientaient ; elle grondait, en riant de bon cœur, l’abbé Gobelin qui la comparait aux Clotilde, aux Berthilde, aux Blanche de Castille, qui ne savait plus comment la saluer et qui s’embarrassait dans les plis de sa soutane. Pour tous, en un mot, elle entendait être « toujours la même, et ne voulait pas être traitée autrement que rue des Tournelles » ; elle tenait à ne paraître que ce qu’elle était — comme elle disait en caractérisant avec bonheur sa situation — « non pas grande, mais élevée. »
Politiquement, quelle a été son action ? C’est un point que nous ne pouvons que toucher, bien qu’il ne soit pas sans rapport pour la connaissance de son caractère avec la question qui nous occupe. Elle y a trouvé des juges sévères. Saint-Simon, la Palatine, de nos jours Michelet, l’accusent formellement d’avoir tenu les rênes du royaume pendant les vingt dernières années du règne de Louis XIV et contribué personnellement à tous les malheurs de la France. À l’entendre elle-même et les Dames de Saint-Cyr, elle n’était pas née pour la politique : « la droiture de son cœur et la justesse de son esprit l’éloignaient des intrigues » ; la maxime qu’elle s’était fait graver sur son cachet, rectè, lui interdisait tous les détours de l’ambition. Ce jugement, sans doute, n’est pas sans complaisance ; et l’on ne peut guère s’en rapporter à elle quand elle déclare qu’elle n’a point d’intérêt à servir. Toutefois il est certain qu’elle avait dans l’esprit plus d’exactitude que d’étendue, plus de prudence que de hardiesse. Ses lettres, où elle met son cœur à nu, ne révèlent aucun projet