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malade. Son agonie ne fut adoucie, car il alla promptement aux extrémités du mal, qu’en apprenant que son fils allait se marier avec la fille de M. Richomme, un bon et vieux droguiste comme lui. Il mourut presque consolé ; il pensa qu’un petit-fils à venir vengerait ce moment de faiblesse et de désertion aux principes. Peut-être son fils lui-même y était déjà revenu, puisqu’il s’alliait aux Richomme. Cette dernière opinion de feu M. Fleuriot n’était pas bien fondée. Alexandre Fleuriot était entré dans la famille des Richomme, moins par un retour aux doctrines commerciales de sa race, moins, il faut aussi l’indiquer, par suite d’un amour profond pour Lucette, moins surtout pour augmenter sa fortune que pour profiter de l’influence de son beau-père sur les commerçants, les fabricants, et les industriels de tout genre, enclavés dans l’arrondissement dont il briguait la députation. M. Richomme le recommanderait, l’accréditerait auprès des douteux (et il y en a toujours tant !), le raffermirait auprès des bien intentionnés ; enfin il obtiendrait partout pour lui ce qu’il n’acquerrait jamais seul. Avant la dernière soirée où il venait d’être encore question de ces démarches à faire auprès des électeurs, Fleuriot avait déclaré ses intentions à son beau-père, tout porté, comme on l’a vu, à se mettre à la disposition du mari de sa fille unique, Lucette ; considération, plus puissante auprès de lui que celle d’avoir un gendre député. Le bonheur de M. Richomme était moins difficile à réaliser ; d’ailleurs, il était à peu près atteint : vivre obscurément à la campagne avec sa femme le reste le ses jours ; et il avait déjà un pied dans cette retraite si ardemment souhaitée. Dans huit jours il aura laissé pour