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vina et à moi tous ses jouets ; quand Glorvina mourut il y a deux ans de la maladie que j’ai aujourd’hui, John, j’héritai à mon tour ; — ne dois-je pas à mon tour aussi vous donner tout ce que je ne puis léguer à une sœur, puisque je suis la dernière de la famille ? John, acceptez donc cet album.

— Katty, fit M. Anderson, vous parlez trop. Je serai forcé de prier vos amies de vous laisser en repos.

Un regard compatissant de la petite lady exprima sa suave résignation ; et, pour apaiser la sévérité du chapelain, elle but la boisson que lui offrait sa gouvernante.

— Puisque M. Anderson ne veut plus que je parle, approchez un peu, dit Katty.

Et, prenant sur la table qu’on avait avancée près d’elle un objet quelconque parmi ses joujoux, elle le remettait à un enfant, et elle l’embrassait.

Anderson avait ses deux mains sur le visage. L’homme de Dieu et de la science pensait et priait.

Aucun des enfants n’avait une idée précise de la cause funeste à laquelle cette munificence était due. Insoucieux comme à leur âge, ils laissaient se dépouiller Katty, sans éprouver d’autre impression que celle d’une joie confuse. Quelques-uns seulement entre les plus âgés devinaient un mystère pénible sous ces dons faits dans un appartement silencieux que le soir remplissait déjà de son ombre mélancolique.

Anderson me fit un signe ; je me glissai dans l’alcôve, tout auprès de lui.

— Voici la nuit, me dit-il, l’heure des crises. Je sens que la fièvre redouble ; touchez la main de l’enfant. Pen-