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phrases qui ne l’auraient pas empêché de poursuivre sa conversation, s’ils n’eussent été suivis de ceux de légat et d’indulgences. Sans confier ses craintes à son interlocuteur, aux mots rapprochés d’indulgences et de feu, il allongea le bras, retira peu à peu son rouleau, le glissa sous la table, puis le cacha sous son manteau, qu’il croisa.

L’étranger se pinça les lèvres pour ne pas rire de cet excès de précaution.

— Si vous l’avez pour agréable, continuons notre propos, seigneur Vénitien.

— Je poursuis donc. L’empereur, dit le Vénitien à voix basse, accorde, pour de l’argent, à ses bien-aimés sujets la faculté de vendre à sa place. Il a ce qu’on appelle des fermiers… — Qu’est-ce donc qui vous excite à rire, seigneur étranger ?

— Ah ! seigneur Zodiaco, c’est, que je commence à comprendre.

— Mais encore ?

— Oui, vous prétendez, au moyen de votre ingénieuse comparaison, me persuader que vous êtes fermier du pape à Wittemberg, en Saxe, pour le commerce des indulgences.

— C’est cela même. Dieu soit loué ! on comprend donc quelquefois de l’autre côté du Rhin. N’est-il pas très-naturel, ce marché ?

— Il serait très-naturel sans doute, seigneur Vénitien, si le pape, permettez-moi de vous le dire, vendait des légumes, des fruits, de la farine, pour les revendre ici ; mais…

— D’abord, seigneur étranger, comme vous commencez