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saigne d’en perdre trois sur cinq. Et celui qui n’en a qu’un pour héritier, posséda-t-il cinq enfants braves, dévoués, et bons comme vous, Ulrich, celui-là n’est-il pas trois fois plus à plaindre ? Et vous le connaissez celui-là ?

Ulrich se pencha vers son père ; il lui baisa la barbe avec respect.

Johann s’était presque endormi sur l’admirable Tewerdanck.

Un knetch prévint le graf que le sondeur des mines sollicitait la permission de lui être présenté.

Il entra.

Au-dessus, du serf par sa charge, qui consistait principaiement à mesurer avec une sonde le travail de chaque ouvrier des mines, Gottfried jouissait de la demi-liberté de ne pas être obligé de vivre continuellement sous la terre ainsi que ses compagnons. Par son entremise, le graf communiquait ses ordres aux mineurs, et ceux-ci se servaient du crédit de Gottfried pour faire parvenir au graf leurs demandes et leurs plaintes. Comme d’usage, les ouvriers l’abhorraient. À les en croire, Gottfried était un espion, un flatteur.

— Voyons, Gottfried, qu’as-tu à nous apprendre ?

— Qu’il y a fête à l’enfer dans trois jours, seigneur.

— Pourquoi cela, Gottfried ?

— Vous n’avez pas oublié qu’à chaque anniversaire de votre fête vous délivrez, en commémoration d’un si beau jour pour nous, un serf de vos mines.

— Vous ne m’aviez pas rappelé, Johann, que c’était dans trois jours ma fête.