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— Non-seulement pour cela, mais encore parce que Tewerdanck, qui signifie nobles — pensées, est notre glorieux empereur, Maximilien Ier, peut-être auteur des premiers chants de ce livre, parce que Ruhmreich, riche en gloire, est le duc de Bourgogne, dont la fille est celle que le chevalier Tewerdanck poursuit sous le nom symbolique d’Ehrenreich, riche en honneur, et parce que ces ours, ces lions, ces naufrages, ces incendies, auxquels échappe le chevalier, sont autant dé vices que les nobles pensées doivent vaincre pour s’unir à riche en honneur ; du moins, je le crois ainsi, mon frère.

— Bah ! vous voudriez me persuader qu’il y a autre chose là qu’un homme marchant sur des épées, Ulrich !

— Voudriez-vous, Johann, me dire quelle si grande valeur déploierait le chevalier à marcher sur des lames d’épées qui ne peuvent le blesser, lui qui a arraché la langue aux lions ? Chacune de ces épées est un vice vaincu par Tewerdanck.

— Il n’y a qu’un instant, Ulrich, que vous souteniez que le vice c’était l’ours ; maintenant, vous me dites que ce sont les épées : vous raillez, mon frère.

Pendant cette discussion, les deux têtes blondes d’Ulrich et de Johann se touchaient et se trouvaient au niveau des genoux du graf, qui, courbé et appuyé sur eux, voulait aussi connaître ce nouveau roman en vers, dédié au jeune Charles-Quint, petit-fils du héros célébré par le chapelain Pfintzing, et supérieurement gravé sur bois par Hans Schœufdin. D’enluminure en enluminure, de chant en chant, le graf et Ulrich furent entraînés par Johann, et l’un et l’autre, le grave père et le fils moraliste, oublièrent,