Page:Gozlan - Les vendanges, 1853.djvu/320

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vous apprendrez de quel côté ils en dirigent la pointe. Contre nous ! contre nous !

Beaucoup d’amertume coulait des lèvres du graf, qui était puissant de raison quand il portait sa pensée devant l’institution féodale, lorsqu’il s’y plaçait à la tête comme une bannière ; redevenu père, il se sentait désarmé et à terre.

— Dieu veuille, continua-t-il, que vous, n’ayez pas à vous repentir, Ulrich, du mépris que vous affectez pour la vocation la plus sainte, la plus libre de toutes ! Vous y réfléchirez.

— Oui, mon père.

— C’est vraiment admirable ! interrompit tout à coup Johann en frappant des mains et en trépignant. Mais voyez donc ! le chevalier Tewerdanck, qui, après s’être battu avec deux lions, figure xlii, mit zwayen Leoben, lutte, page 48, avec un ours plus gros que celui des armes d’Oppenzell, mit einem Beren. Voyez-le encore, la pique en main, frappant l’animal à la tête, comme tout noble chasseur le doit. Quoique prêt à dévorer Tewerdanck, l’ours semble respecter les éperons d’or du chevalier ; et pourtant c’est une bête bien cruelle, assurent les vers de Melchior Pfintzing : Es ist wahrlich ein grausam Thier. Vous n’aimez donc pas Tewerdanck ? vous ne le connaissez donc pas ? Mais que connaissez-vous alors, Ulrich ?

— Je connais Tewerdanck, mon frère, répondit avec une réserve qui n’était pas sans malice, Ulrich, en posant le doigt sur le livre de Johann ; et je l’aime parce qu’il m’apprend quelque chose.

— À chasser aux ours, avec la pique et le couteau.