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le savoir. Les bonnes gens ignorent les bancs de diamants auprès desquels ils passent tous les jours.

— Tu es ambitieux, dit Marcelin à Marc.

— Et toi ? répliqua Marc.

— Moi aussi, répondit Marcelin.

— Nous sommes bons chimistes tous les deux, reprit Marc, nous en savons plus dans le petit doigt que tous les industriels du département, dont nous sommes pourtant les très-humbles vassaux du côté de la fortune.

— Oui, cela est ainsi, reprit Marcelin en soupirant. Mais qu’y faire ? As-tu découvert un agent chimique pour décomposer les ingrats, dissoudre les faquins et vaporiser les fripons ?

— Non, répondit Marc, mais j’ai trouvé le moyen d’être aussi heureux, aussi riche, aussi puissant qu’eux sans être voleur.

— Mon ami, vends tout de suite ton secret au gouvernement. Mais tu plaisantes, et je plaisante comme toi.

— Je ne plaisante pas, et la preuve, c’est que je vais te confier ma recette. Allons à Paris, et livrons-nous à l’étude de la chimie et de la physique ; tout est à faire dans ces deux sciences, avec lesquelles l’Empire n’a su fabriquer que de la poudre à canon et la Restauration que du sucre de betterave. J’entrevois des merveilles derrière ce rideau de gaz, de vapeur, de fumée ; rideau léger, et qu’un souffle du génie peut emporter au loin. Nous le repousserons. Quel pauvre théâtre pour nous que cette ville où nous avons eu le bonheur de voir la lumière, ville où l’on fait du fer avec du fer, du plomb avec du plomb, du cuivre avec du cuivre ! Oh ! les illustres sorciers, les radieux ma-