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par ton indiscrétion, de lui laisser croire que sa vie est en danger. Adieu, Dauphin. Viens ici quand tu voudras.

— Monseigneur, j’espère revenir bientôt.

Dauphin sortit de l’hôtel avec la conscience d’avoir fait la meilleure action du monde, en contractant avec le prince.

— Si cet imbécile avait été l’amant de la femme, murmura le prince, en voyant s’éloigner les plumes de coq de Dauphin, j’aurais eu la femme par le domestique : et le mari par la femme ; l’emprunt était souscrit en huit jours. Puisqu’il n’en est pas ainsi, il a fallu tourner la direction des batteries. Attendons… La femme n’a pas d’amant, pas d’intrigues ; mais le mari ?… Ni l’un ni l’autre, ce n’est pas possible.


VI

Dans le faubourg Saint-Honoré, et sur la porte de la maison de Reine Linon, la conversation que nous allons rapporter avait lieu, quelques jours après la visite de Dauphin au prince.

En tendant son cou vers le magasin de la fruitière, le portier de la maison disait : Est-ce étonnant, voilà trois jours que la petite blanchisseuse n’est pas rentrée ! Il lui est arrivé quelque chose.

La fruitière, en s’adressant à l’épicier, répétait : Est-ce étonnant, voilà six jours que la petite blanchisseuse n’est pas rentrée chez elle. Elle est partie avec quelqu’un.

Trois jours étaient devenus six jours, et quelque chose s’appelait déjà quelqu’un.