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Dauphin sourit à cette bouffée d’encens, au milieu de laquelle il ne vit pas beaucoup plus clair.

Si c’est excès d’esprit, se dit le prince, qui en doutait fort, je ne risque rien, il me rendra la main ; si c’est de la stupidité je risque encore moins.

— Jugez vous-même, monsieur Dauphin, reprit-il, dans quel embarras vous me mettriez, dans quelle position vous vous placeriez vous-même, si madame Ervasy s’opposait ouvertement à ce que vous sortissiez de chez elle : on s’attache aux personnes dans toutes les conditions. La vôtre n’exclut aucune affection profonde, sincère, élevée.

Le prince s’arrêta ; la mine touchait aux parties vives.

Dauphin baissa la tête.

J’ai deviné, se dit le prince ; la place est à moi. Il faut qu’on capitule : sonnons l’assaut.

— Puisque décidément monseigneur ne veut pas de mes services, répliqua Dauphin, je lui demande pardon de l’avoir dérangé.

Dauphin se disposa à sortir.

Que de finesse, ou que de bêtise, réfléchit le prince ; je n’ai pu rien en tirer.

— Non, restez, monsieur Dauphin, s’écria-t-il ; j’ai mieux à vous dire. Vous ne quitterez pas la maison Ervasy, et vous passerez pourtant à mon service. Je vous prends ; mais, ne pouvant vous emmener avec moi dans mon voyage, qui doit durer un an, je vous laisserai à Paris. On vous payera régulièrement cinq cents francs par mois jusqu’à mon retour ; et à mon retour, je vous attacherai entièrement à ma personne. Ainsi tout se concilie :