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faire l’autre jour sur les boulevards, quand votre promptitude nous eut préservés d’un choc qui pouvait avoir des suites fâcheuses. La jeune lady et sa maison joignent leurs remercîments aux miens.

— Faible service, monsieur ; devoir du premier passant.

Après l’échange ordinaire des politesses usitées en pareil cas, la conversation, entre M. Anderson et moi s’arrêta ; je pressentis le moment où le docteur allait se lever pour me quitter. J’aurais craint d’embarrasser sa visite, dont la tâche était remplie, une fois ses remercîments reçus, en cherchant à renouer la conversation à d’autres sujets.

Il me tendit la main.

Je crus qu’il me disait adieu à la libre manière de son pays ; je lui tendis la mienne.

— Cette enfant vous intéresse beaucoup, me dit-il ; et qui ne l’aimerait pas ? Il lui est échappé l’autre jour, à l’instant où nous vous quittions, une phrase bien cruelle ! bien cruelle pour nous, monsieur, quoiqu’elle l’ait assez souvent sur les lèvres depuis un an.

— Depuis un an ! monsieur ; elle est bien jeune pourtant, lady Katty.

— Vous savez donc son nom ?

— Je l’ai retenu au passage, de vous-même, je crois.

— Maintenant je me souviens. Lady Katty a sept ans, et je pourrais vous dire combien d’heures et combien de minutes. Pauvre enfant ! ajouta M. Anderson.

Je n’interrompis pas son silence.

Il soupira, et reprit :

— On doit sa pensée à ses amis : je vous dirai…

— Je n’exige que votre amitié.