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gendre n’a pas besoin d’emploi, puisqu’il est riche et qu’il se bornera à l’ambition de vous représenter. Sa modestie l’empêche de vous dire qu’il a des habitudes tout à fait bourgeoises, des goûts casaniers, de solides principes d’économie.

— Cependant, intervint un autre électeur, M. Fleuriot ne va jamais à pied dans Paris, et sa mise n’est pas simple comme les goûts que lui prête son honorable beau-père, M. Richomme.

— Il me semble, répliqua Fleuriot un peu ému, que l’on descend beaucoup trop avant dans ma vie privée. Mes revenus, messieurs, me permettent d’avoir des chevaux et une voiture ; je ne suis pas de ceux qui ne conçoivent la probité qu’en compagnie de la misère.

Le mouvement oratoire fut beau ; mais il ne rallia pas tous les suffrages.

— Si mon gendre va souvent en voiture, reprit Richomme, c’est que sa santé exige de l’activité dans les organes. À trente-deux ans on prend de l’embonpoint ; ceci est plus facile à voir qu’agréable à avouer. Au surplus, la dépense de deux chevaux, puisque nous causons ici entre braves gens qui s’estiment, est largement couverte par le plus grand nombre d’affaires qu’il est permis de traiter en allant en cabriolet.

— Oui ! oui ! murmurèrent les électeurs, en gens convaincus par l’explication.

— Un d’entre eux, toutefois, osa encore dire :

— Pourquoi M. Fleuriot ne s’est-il pas contenté d’exercer la droguerie dans le modeste magasin où vous, monsieur Richomme, avez fait peu à peu, avec lenteur, pa-