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une demi-heure que Richomme était de retour dans sa boutique, qu’il avait déjà conclu un marché.

Quand l’acquéreur fut parti, Richomme dit à Fournisseaux :

— Vieux, que crois-tu que j’aie pilé dans ce mortier ?

— Dame ! c’est de la gomme.

— C’est la goutte, la jaunisse et la mort que j’ai broyées d’un seul coup sous mon pilon. Fournisseaux ! voilà ma guérison trouvée ! Voilà ma santé revenue ! Maintenant allons voir ma fille ! et retiens toujours ceci, Fournisseaux : Le bonheur, pour nous autres, gens de peine et de travail, ce n’est pas le changement, c’est encore le travail et la peine.

— Je m’en avais toujours douté, monsieur Richomme.

Quelle sagesse modeste dans ce stupide et admirable Fournisseaux !


XIV.

Richomme était rentré sous le toit domestique à un des moments les plus propres à exercer cette activité dont il avait depuis si longtemps perdu l’usage pour le malheur de sa santé. Son gendre devait le lendemain même répondre aux questions que lui adresseraient, dans un grand local, les électeurs réunis en assemblée préparatoire ; car une dissolution avait eu lieu, et la chambre élective allait de nouveau se constituer. Quoiqu’il y fût préparé, Fleuriot subirait une pénible épreuve. Heureusement le résultat ne lui semblait pas douteux après les promesses de tant