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chaudes clartés de juin, le regard vague, triste, balancé sur la campagne, l’oreille charmée par le doux murmure de l’eau courant près de lui, Richomme répétait : Quelle belle chose que le commerce !

Une fois dans le chemin du découragement, il s’affaissa, il fut atteint de langueur ; son appétit fut inégal, son sommeil perdu, et ses idées s’assombrirent en proportion de ses ennuis. Sa fille ne l’aimait pas ; son gendre le reniait par sa conduite ; ses anciens amis l’avaient déjà oublié. Madame Richomme exigea enfin qu’il consultât un médecin, tant elle fut effrayée de l’altération progressive de sa santé. Un médecin ! je suis donc un homme perdu, se dit Richomme. Encore un effort sur moi-même ! Allons à Paris faire mon testament, puis je reviendrai mourir ici !


XIII.

Quelle différence entre ce voyage funèbre de M. Richomme et celui qui l’avait conduit, il y a trois mois, aux Petits-Déserts ! On se souvient de son épanouissement lorsqu’il aperçut la Marne, de sa joie d’enfant à voir des murs couverts de lierre, des arbres qui semblaient lui dire en balançant leurs têtes : Venez à nous, monsieur Richomme ! Nous, vous donnerons à profusion de l’ombre et des fruits. Maintenant il se tenait caché dans un coin de la voiture, le front plissé, les mains traînantes sur ses genoux, le regard enfoncé dans sa tête soucieuse. Il rentrait dans Paris à l’heure triste du soir, quand il n’y a encore que quelques pâles réverbères allumés au milieu