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m’oblige à ne pas négliger d’inviter à mes soirées le curé de la commune, et par la même occasion, mes voisins, les manufacturiers anglais. Je prendrai conseil de ces braves gens.

Navré de ce qu’il avait vu, il descendit à la maison, où il trouva un petit paquet à son adresse. — Ce sont mes enfants qui nous écrivent, pensa-t-il en déchirant l’enveloppe ; j’ai besoin de cette compensation, dans l’état où je suis. On vit comme des loups, ici, se dit-il sans pouvoir retenir ce cri qui, trahissait l’espèce de découragement où il venait d’être jeté. — Mais, ce ne sont pas des lettres, ma femme. Ah ! je le reconnais bien là, c’est Fournisseaux, tiens ! regarde ! c’est Fournisseaux qui m’envoie tous les prix courants des marchandises depuis notre départ. — Richomme palpitait de joie en touchant à ces poésies du commerce ; il froissait les prix courants, les étalait sur la table ; il les aurait embrassés, s’il l’eût osé. — Bravo, Fournisseaux ! tu as deviné les désirs de ton maître, sois remercié de ta bonne inspiration ; Et Richomme lisait à haute voix ; — Prix courant des marchandises ; sucre bourbon, tant ! sucre, brut, tant ! café martinique, tant ! café moka, tant ! Enfoncés les accapareurs. Cannelle ceylan, tant ! J’ai gagné vingt mille francs en vingt jours. — Femme, viens que je t’embrasse. — Arsenic, tant ! cacao demandé, bien ! maragnon, en souffrance ! plomb, en hausse ; bon ! Chalamel est sauvé. — Il en avait trois mille quintaux. — Gomme vermiculée, rare ! — C’est cela ! je l’avais dit à la Bourse ; tant pis pour qui ne m’a pas écouté. — Soufre, en baisse ! — Je l’avais encore dit. — Poivre de Bombay, très-recherché. — Quel