Page:Gozlan - Les martyrs inconnus, 1866.djvu/274

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Je n’aurais jamais osé vous les réclamer.

— Et moi, madame, je tiens à vous les rendre. Accordez-moi quelques minutes.

Après un peu d’hésitation, Ambroisine s’assit au bord d’un fauteuil, mais sans même dénouer son chapeau.

— Vous avez quelque droit, j’imagine, reprit Vaudreuse, sur ces porcelaines du Japon. Elles furent données autant à vous qu’à moi par notre ami commun, le capitaine Black, de Baltimore. Gardez le cabaret tout entier, Ambroisine, pour peu que vous le souhaitiez.

— Non, monsieur, je ne veux pas de vos largesses.

— Parbleu ! nous le partagerons, puisqu’il en est ainsi. Aussi bien, aucune de ces douze tasses n’est semblable à l’autre. À vous six, à moi six. À qui le sucrier ?

— À vous, monsieur.

— Alors à vous, madame, le plateau de laque. Et j’y songe, la chaîne de ma montre vous appartient. Prenez ! prenez !…

— Mais la montre est à vous, monsieur.

— Vous voulez donc me la rendre ? Soit !

Vaudreuse mit tant de dépit à séparer la chaîne de la montre, qu’il eut l’air, en détachant le dernier anneau, de le briser avec colère.

Avec sang-froid Ambroisine prit la chaîne, et dit, en la déposant sur le marbre de la table :