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avec le marquis de Lignolles. Et quel profond contresens chez Louvet ! Son Faublas, qu’il produit comme un homme d’esprit, se lève toujours de bonne heure et on ne le voit pas une seule fois se mettre au bain. Jamais le pédicure ni le dentiste n’entrent chez lui. On peut gager que ses ongles étaient limés jusqu’à la chair. J’ai toujours regardé Faublas comme un type de hasard, comme une gravure licencieuse, créée pour irriter les goûts des commis, qui se figurent que les marquises se nourrissent de pâte d’amande.

Léonard n’avait pas un appartement de roué, et il avait trop d’esprit pour faire asseoir ses amis sur des roses, ce qui serait fort incommode, malgré l’autorité des anciens. Autant vaudrait louer l’odeur du crin où l’on s’assied, que de vanter les roses comme un doux siége. Chez lui, on s’asseyait sur de jolies chaises en velours vert, et on posait ses pieds sur des tapis moelleux comme quatre pouces de neige. L’appartement qui attendait les trois amis de Léonard était chauffé à un degré délicieux de température : ni trop ni trop peu de clarté, milieu qui n’est pas si indifférent qu’on le pense à l’édification des sens. Un souper est une perle excessivement précieuse ; les ignorants percent la perle ; les habiles seuls, et ils sont rares, savent la monter en diadème. Cherchez encore un souper qui ait le sens commun dans Faublas ; triste viveur ! il n’est pas impossible qu’il bût de la bière, ce vin des Allemands.