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dans lequel il a toujours vécu, sans lequel il ne saurait vivre. Eh bien, madame, je vous vis, je vous écoutai, et je m’écriai dans la joie de ma découverte : « Voilà une femme qui a de l’or… moi, je n’ai que mon amour ; je vais lui vendre mon amour pour Georges, et Georges sera heureux. » — Et je vous ai vendu tout ce qui faisait ma joie, mon orgueil, mon espérance, mon repos, mon bonheur, ma vie dans ce monde.

— Vous avez fait cela !

— Je vous ai laissé épouser M. de Blancastel que j’allais épouser moi-même dans quelques jours, dans quelques heures.

— Ah !… tenez, madame, s’écria Hélène, hors d’elle-même, exaltée de toute l’exaltation de Valentine, qu’elle admirait maintenant, c’est sublime ce que vous avez fait là ! c’est touchant ! vous m’avez brisé le cœur. Ah ! que n’ai-je su tout ce que je viens d’apprendre ! — Je n’aurais pas souffert un pareil sacrifice ; je vous aurais serrée en frémissant contre mon cœur ; je vous aurais dit : « C’est votre bien, vous l’aimez, soyez heureuse avec lui. Ni mon or ni ma présence ne viendront plus vous troubler. » J’aurais fait comme vous, j’aurais répandu quelques larmes, et je vous aurais dit : « Ne faites pas attention, madame, c’est mon orgueil qui souffre ; une soirée de bal séchera tout cela. » — Non ! je n’eusse pas agi ainsi ;