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— Mon pauvre Adrianoff, il y a là-dessous…

— Il y a… J’achève. — Adrianoff reprit ainsi la lecture de la lettre de son intendant : — « À cette infirmité, qui n’a rien de bien intéressant en elle-même, votre jeune protégé joignant encore celle d’avoir les cheveux rouges, on l’appelle le fils du diable dans toutes les rues de Cologne que nous traversons. Comme on me prend pour son père, vous sentez combien il est pénible pour moi… » Les cheveux rouges ! dit en s’interrompant lui-même Adrianoff, quand j’ai acheté un enfant avec des cheveux noirs, des cils noirs, le teint noir, des yeux noirs !

— Parbleu ! interrompit à son tour Duportail, ce n’est pas le même enfant.

— Non, ce n’est pas le même ! Comme il était nuit, comme l’enfant était caché dans un manteau quand on l’a conduit au chemin de fer, où, d’ailleurs, ce n’est pas moi qui l’ai reçu, mais Michaïloff, qui ne l’avait jamais vu, le brigand de père m’a joué ce tour infâme. De ses deux enfants, il m’a vendu le plus beau, mais c’est le plus laid qu’il m’a livré. J’ai acheté un ange et j’ai emporté un singe. Vingt mille francs pour avoir un héritier bossu et qui a les cheveux rouges ! — Oh !…

— Qu’allez-vous faire maintenant ? demanda Chabert.

— C’est déjà fait. Le télégraphe a joué. J’ordonne à