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perron ; elle me promène aux Champs-Élysées, au bois de Boulogne, où il plaît au cocher de me conduire ; puis elle me ramène ici ; ici, le domestique me prévient à six heures que le dîner est servi, et je me mets à table. La nuit vient ; les bougies s’allument ; on annonce mes amis ; on cause, on discute, on fait du bruit autour de moi. À minuit, tout rentré dans l’obscurité et le silence, pour recommencer le lendemain avec la même fidélité monotone.

Pendant cette confession à demi-voix de son temps et de ses actions, Valentine sortait de ce sommeil de l’esprit où elle semblait avoir été si longtemps plongée ; ses regards s’agrandissaient, sa parole avait la conscience de ses idées ; enfin, de réalités en réalités acquises, elle parvint à cette explosion éclatante :

— Depuis mon retour, depuis un mois, j’ai donc vécu dans le sommeil ! Ah ! vous venez de m’éveiller !

La joie de Georges fut à la hauteur de cette révélation.

— Mais, si c’était la vérité, ce que vous venez de me dire là, savez-vous ce que je penserais, malgré l’opinion du monde, sur vous, malgré mes doutes, malgré mes craintes, malgré ?…

Gabriel annonça au même instant :