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le dragon rouge.

terons, et au milieu desquels nous ne cesserons de nous entretenir de vous. Je ne manquerai pas de vous écrire si don Alvarès a tenu sa promesse, s’il est parvenu à effacer la triste opinion que nous avions conçue d’abord de l’Espagne et des Espagnols.

« Votre fille sincère et obéissante,
« Léonore. »

Si la marquise fut contente de la franchise de ses deux enfants, elle le fut beaucoup moins de la joie qu’ils éprouvaient d’avoir fait si fortuitement la connaissance de don Alvarès ; elle s’inquiéta de leur facilité à se confier à un inconnu, à un étranger, rencontré par hasard au milieu d’une rue de Madrid.

En pensant au caractère un peu soudain de cette liaison, elle décachetait la lettre qui venait la troisième par ordre de date. Mais elle sortit tout à coup de sa réflexion. « J’oublie, dit-elle, qu’il y a bientôt un an que leur lettre est écrite, et que les suivantes m’apprendront tout ce que je n’ai pas besoin d’imaginer. »

La troisième lettre n’était pas de l’écriture de ses enfants. Elle était sans désignation de pays : « Qui donc m’écrit ? » Elle court à la signature. Point de signature ; rien que ces mots :

« Pourquoi vous êtes-vous séparée de vos enfants ? »

— Je me suis séparée d’eux, s’écria la marquise, comme si une voix du ciel l’interrogeait, pour que ma fille ne fût pas enlevée par ce… Mais continuons, s’interrompit-elle. Je vais savoir quel est ce jeune homme, cet Alvarès.

Elle rompit vivement le cachet de la quatrième lettre, et elle lut :

« La première des trois fêtes, chère maman, n’est pas restée au-dessous du plaisir que nous en attendions, Léonore et moi. Comment seront donc les deux autres ? Décidément, je reviens de mon premier jugement sur l’Espagne. L’Espagne est un jardin, l’Espagne est une fête, l’Espagne est le pa-