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le dragon rouge.

comment s’est conduit notre drôle de personnage ; au lieu d’une leçon, il en mérite deux. Il nous appartient.

— Je veux, disait l’un, aller offrir son berret à madame la marquise de Courtenay.

— Je veux, disait l’autre, l’obliger à rentrer dans la salle avec une seule guêtre.

— Messieurs, reprenait un troisième, je veux tout ce que vous voulez, mais encore faut-il vouloir qu’il se rende ici.

— S’il n’y venait pas, en effet ?

— S’il est parti, ajoutait un autre.

— Parti ! mais oui, sans doute, il peut être parti ! Qu’un de nous, s’il en est encore temps, aille le prier de venir au foyer. J’y vais moi-même.

Le dernier interlocuteur ouvrait en courant la porte du foyer ; il s’arrêta.

Raoul s’avançait lentement.

Il n’était plus qu’à quelques pas de la porte du foyer lorsque huit ou dix de ces jeunes gens en barrèrent l’entrée avec quatre longues banquettes et tous les tabourets qu’ils trouvèrent sous leurs mains. Les préparatifs de cette plaisanterie n’échappèrent pas à Raoul ; il comprit sans peine à l’adresse de qui elle allait. Il ne s’avança pas moins. Arrivé devant l’obstacle, il l’enjamba avec la légèreté d’un chasseur de daims, et alla s’asseoir dans un coin du foyer sur l’unique tabouret oublié par les auteurs de la barricade.

Tous les jeunes seigneurs se regardèrent avec un air de dire : On peut tout oser avec lui ; osons encore.

Un lampion était fixé au mur au-dessus de la tête du jeune dragon.

— Je vous demande bien pardon, lui dit un de ces fous en posant le pied sur le bord du tabouret où il était assis, mais l’huile est chère dans cette saison ; permettez-moi d’éteindre ce lampion.

Il éteignit le lampion.