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le dragon rouge.

première galerie, où il laissa présumer qu’était sa place. Descendus à l’orchestre et placés sur la scène où il était encore d’usage de s’asseoir, les jeunes officiers du foyer suivaient attentivement du regard celui dont ils avaient projeté de s’amuser pendant le prochain entr’acte. Ils le virent s’avancer jusqu’à l’avant-dernière loge de la galerie, et s’arrêter à cet endroit sans avoir causé le moindre désordre parmi les spectateurs, qu’attachait de plus en plus la musique de l’opéra nouveau. Il était arrivé à sa place.

Raoul de Marescreux posa sur la banquette son béret de velours. On attendait qu’il s’assît. Il resta debout, les yeux tournés non pas vers la scène, mais vers la loge placée derrière lui, et il se mit ensuite tellement près de la balustrade dorée dont elle était défendue qu’il aurait pu aussi aisément s’y accouder que s’il eût été dans la loge avec les trois personnes qui l’occupaient. Elles ne remarquèrent pas d’abord l’attention dont elles étaient l’objet de la part de leur voisin ; du moins cette attention échappa-t-elle au premier instant aux deux hommes assis derrière la jeune dame, plus particulièrement observée par Raoul. L’acte était long ; il durait déjà depuis une demi-heure, et Raoul n’avait pas cessé un seul instant de tenir son regard obstinément fixé sur la loge près de laquelle il était debout. Les jeunes officiers dont les yeux ne l’avaient pas quitté, s’aperçurent les premiers de cette étrangeté, et elle les confirma dans l’opinion déjà préconçue chez eux que leur dragon était quelque gentillâtre bien simple, bien naïf, détaché de ses montagnes du Béarn par une avalanche, et roulé avec les neiges de l’hiver jusqu’à Paris. C’était un ours égaré loin de sa tanière. Ils communiquèrent leur opinion à leurs voisins, et bientôt la salle entière plaisanta sur le compte du beau dragon, si complètement étranger aux usages, aux façons de se conduire dans le monde. Lui ne bougeait pas. Il était jeté en bronze ; son regard ne changeait pas plus de direction que celui de la statue d’une place publique.