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le dragon rouge.

du cent-suisse devint rond et clair comme les petits écus qui battirent la chamade dans le creux de sa main. Il ferma sa main, fit un demi-tour sur lui-même, et alla trouver son capitaine.

Deux minutes après, on entendit une voix qui disait, du fond du vestibule : « Mais viens donc ! madame la nourrice, viens donc ! Laissez passer vous autres. » Et un bel officier suisse, au teint enluminé comme le drap de son habit rouge, prenait Marine sous le bras et lui faisait monter le grand escalier des Tuileries avec autant d’attention et de prévenances qu’il pouvait en montrer au milieu de ses témoignages bruyants d’amitié.

Mais à la porte de la salle des maréchaux, nouvel obstacle.

Le capitaine de Varden eut beau dire à l’officier de service : « J’accompagne madame, laissez entrer, » l’officier refusa poliment. La mise de la dame, mise fort peu de cour, ne le rassurait pas du tout. M. de Varden s’amuse, pensa-t-il.

— Ah ! tu refuses, dit Marine, alors je passe.

— Maréchal ! cria-t-elle en même temps à M. de Tavannes, qui traversait en ce moment, maréchal ! dis donc à ce jeune homme-là qui je suis.

Le maréchal chercha pendant quelques secondes à reconnaître les traits de celle qui lui parlait ainsi, et puis, allant tout à coup vers Marine en lui tendant les deux mains, il dit à l’officier de service : « Madame a ses entrées à toute heure ici. » Marine fit un hochement de tête au maréchal de Tavannes, et comme si elle ne fût jamais sortie du château, elle se dirigea avec lui vers les appartements du roi.

Il n’est pas un valet de chambre dont elle ne fût connue. C’étaient de leur part des saluts jusqu’à terre et des félicitations à chaque pas. Où avait-elle été, d’où venait-elle ? et mille questions. Au dernier salon, le capitaine des pages lui dit : « Personne n’entre chez le roi à cette heure, excepté les princes du sang, le médecin et le confesseur de Sa Majesté. »

— Mon beau page, lui répondit Marine, si je ne suis pas