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— Beukslo ! pour qu’il lâchat l’amarre et gagnât le large.

— Beukslo existe, pensai-je : c’est déjà un fait acquis. Peut-être Broek existe aussi. Cela devient probable.

— Mais pourquoi, j’y reviens, me dit Beziers, ce misérable brasseur a-t-il demandé si vous m’emmeniez avec vous à Broek ? où est la raison qui s’y oppose ?

— Est-ce que tu penses encore à cela ?

— C’est que je connais, les Hollandais, monsieur ; ils ne lâchent pas une parole sans la lester auparavant.

— Ma foi ! laisse-moi tranquille, Beziers. Je ne sais pas pourquoi nous nous inquiéterions de la réflexion d’un tonneau de bière.

Le patron, qui ne pouvait nous entendre, nous conduisait rapidement sur une rive où nous abordâmes vingt minutes environ après avoir quitté Amsterdam. En le payant, je lui demandai de quel côté il fallait prendre pour aller à Broek.

— Vous remonterez ce canal, me répondit-il, celui qui joint le Texel au Zuiderzée, et, dans une demi-heure, vous serez à Broek.

— Merci, mon brave homme.

— Ah ! vous allez à Broek ? ajouta-t-il avec un air de grande vénération.

— Nous allons à Broek.

— Pour y demeurer ?

À tout hasard, je répondis d’abord :

— Oui.

— Oui ! s’écria-t-il en sautant hors de sa barque ; oui ! Et il nous fit des révérences auxquelles je ne savais quelle signification raisonnable donner.

— Mais alors, monseigneur !… mais alors, Altesse !… vous auriez dû m’en prévenir…

— Pourquoi vous en prévenir !