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— Je ne puis encore croire… essaya de répliquer le commandant, qui se sentait soulagé d’un grand poids par ce départ.

— En restant plus longtemps, nous n’emporterions pas un souvenir plus doux de ton cœur… Nous…

— Commandant ! s’écria Sara, s’interrompant tout à coup pour embrasser Mauduit, qui ne devinait pas la cause de cette brusque accolade pleine de tendresse et de bonne sensibilité, car Sara laissa tomber des larmes sur les gros favoris du commandant. — Commandant ! commandant !… criait-elle.

— Eh ! ma bonne Sara, qu’as-tu ?

— J’ai… j’ai…Ah ! sacrebleu ! si j’avais eu le bonheur d’être une honnête fille…

— Qu’aurais-tu fait ?…

— Rien… Adieu ! adieu ! commandant !…

Mauduit était ému… il était bien près de deviner… Il dit à Morieux :

— Tu me quittes, toi aussi ? et où vas-tu ?

— Où je vais ? répondit Morieux.

— Oui…

— Rejoindre ma femme.

— Ta femme ! Mais…

— J’ai réfléchi, Mauduit.

— Ah !

— Oui. La nuit porte conseil.

Et Morieux serra affectueusement la main au commandant.

— Quant à moi, commandant, je vous dois une reconnaissance vive, profonde, éternelle, dit Prosper à son tour en gagnant la porte de la cour d’honneur, tandis que Morieux, Sara et ses deux élèves montaient en voiture.

— À moi ?