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jamais ils ne trouveront cette pauvre petite amour, endormie peut-être au coin d’une borne sur des ordures.

— Oh ! s’écria mistress Philipps, ma fille !

— Pourquoi les constables ? poursuivit l’interlocuteur, plutôt les watchmen. Ils ont des crocs et des lanternes, à la bonne heure. C’est leur métier de ramasser. Allez donc, madame, au bureau des watchmen.

— Grâce, mon brave homme ! je m’y rends ; vous me le conseillez ?

— Faites mieux, intervint d’une maison encore : plus éloignée un autre donneur d’avis ; les watchmen, c’est bien ; mais les watchmen n’entrent en fonction qu’à onze heures dans cette saison. D’ici là, l’enfant a le temps de se noyer dix fois dans la Tamise.

— Noyer !

Mistress Philipps s’appuya contre le mur.

— Comme ils parlent de mon enfant !

— Auparavant, présentez-vous au bureau du journal du soir, et, par une insertion qui vous coûtera dix shillings, réclamez votre fille. Les journaux vont partout.

Mistress Philipps était déjà au bout de la rue pour se rendre au bureau du journal.

Une interpellation sortie du caveau d’un marchand de bière la rappela de nouveau.

— Tôt ou tard votre fille, mistress Philipps, vous sera rendue par les watchmen ou les agents du constable, je n’en doute pas, si elle est dans Londres ; espoir vain, si elle n’y est plus. À votre place, j’irais d’abord au plus périlleux. Les ramoneurs volent de petites filles qu’ils habillent en garçon pour en faire des apprentis ; — vous savez l’histoire de lord Melbourn : — quand les bohêmes ne s’en emparent pas, les païens qu’ils sont, pour les habiller en danseuses de cordes.