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rite salaire, vous me permettrez de vous faire une petite pension de six mille francs.

— Une pension !… mon ami…

— Non pas par contrat et par-devant notaire.

— Ah ! et comment ?

— La pension durera autant que le silence.

— Je comprends… comme les ministres pensionnent les députés.

— Est-ce bien convenu ?

— C’est parfaitement convenu. Mais, décidément, nous rompons donc ?… car…

— Pour toujours.

— Vous prenez donc Aglaé, Thémire, Julie ?…

— Je prends femme… je me marie…

— Mes respects à madame, dit alors Praline en tirant d’un air grave et comique sa plus longue révérence au colonel, qui, en homme bien élevé, en gentilhomme du bon temps, accompagna l’actrice jusqu’à la dernière porte, où il lui baisa respectueusement la main sous le gant avant de la quitter.

— Ah ! tu vas te marier ! se dit Poliveau, qui avait entendu la phrase de son maître… vite, la parade… ou nous sommes perdu !

Il se montra.

— Tu étais là, Poliveau ?

— Mon colonel, je rentrais…

— Que tiens-tu à la main ?

— Une lettre que madame la comtesse votre tante m’a chargé de vous donner.

— Qu’a-t-elle à m’écrire ?… C’est bien, donne.

— Mon colonel n’a pas besoin de mes services ?

— Non, Poliveau.

Le colonel rappela aussitôt son valet de chambre.