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les deux salons qui précédaient le boudoir d’un pas triomphal et en personne sûre du bonheur qu’elle vient chercher.

Poliveau profita de la circonstance pour s’éloigner. Il aurait bien voulu se retirer tout à fait, mais il n’osa pas ; le colonel n’avait encore qu’à l’appeler… Malheur à lui, cette fois, s’il n’eût pas été là pour répondre.

— Ah ! mon Dieu !… que vois-je !… s’écria Praline…

— Que voyez-vous donc ? lui demanda le colonel… Que signifie ce cri de surprise ?… Est-ce que cette odieuse farce va recommencer, pensa le colonel…

Trop fine pour ne pas dominer ses émotions, surtout dans une occasion où une maladresse pouvait compromettre ses intérêts, Praline reprit ainsi :

— Déjà trois heures !… Je suis en retard d’une heure, moi qui avais promis d’être ici à deux heures !… Je vous aurai fait attendre ?… Cette impolitesse, mon ami, vaut bien une surprise.

— Vous êtes trop bonne… Asseyez-vous.

— Comme je ne doute pas, dit Praline, évitant de regarder le colonel au visage, que vous ayez obtenu du ministère ce que vous êtes allé y demander pour moi, je me borne à vous remercier, et à vous dire tout de suite, de peur de l’oublier, qu’il faut voir les journalistes avant samedi, jour de la représentation.

— J’ai vu les principaux d’entre eux.

— Mais ils sont tous principaux.

— Eh bien ! je verrai les autres…

— Et les bouquets ?

— Si la représentation a lieu, il sera toujours temps de songer aux bouquets.

— Comment, si elle a lieu ?… Que dites-vous là ?

Le colonel bégaya dans son trouble :