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— En vérité ?…

— Oui, madame la comtesse.

— Et à qui, s’il vous plaît ?

— À son directeur de conscience, qui vient quelquefois déjeuner en tête à tête ici avec lui…

— Jules a un directeur de conscience ?

— Il en a deux, madame la comtesse.

— C’est trop fort ! Ainsi, tu crois que nous ne nous entendrions pas, mon neveu et moi, si je prétendais jouir chez lui d’une liberté d’opinion complète comme celle que je lui accorde ?

— Vous ne vous entendriez pas, madame la comtesse… et le colonel, quoique dévot, est violent…

— Il ne me manquerait plus que d’être exposée aux violences de mon neveu… Me voilà tout à fait édifiée sur son caractère… Je m’étais trompée… Mes projets sur lui sont coulés à fond… Sottenveau, mon ami…

— Poliveau, madame la comtesse, si cela vous était égal.

— Cela m’est parfaitement égal. Poliveau… je ne me ferai jamais à cet horrible nom… tu iras commander des chevaux pour ce soir… non, pour quatre heures… le plus tôt sera le mieux… Ah !… écoute encore… Donne-moi du papier, une plume… Je veux écrire deux mots à ton maître.

— Si madame la comtesse veut aller jusqu’à ce secrétaire, elle trouvera tout ce qu’il faut pour écrire…

En quittant le fauteuil où elle s’était assise, la comtesse promena le regard autour d’elle, et jeta ensuite un cri d’étonnement. Elle passa ses mains sur ses yeux, afin de s’assurer qu’ils ne la trompaient pas ; mais sa surprise ne fit qu’augmenter.

Poliveau s’arma intérieurement contre le danger qu’annonçait cette stupéfaction de la comtesse de Lostains.

— Ce que je vois me confond. Quoi ! mon neveu, qui