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trai les détails, mais dans ma prochaine lettre, car il faut, avant que je ne vous fasse cette confidence, que vous ayez, répondu à celle-ci ; il faut que je sois sûr qu’elle vous est parvenue. Répondez-moi donc et espérez. À Dieu et « à vous.

« Jérôme Dervieux. »


— Ce Jérôme Dervieux doit être quelque employé à nos manufactures de châles de la prairie ; je m’en informerai.

— Que dit-il ? pensa Manette. Mais il finirait par savoir que c’est Engelbert.

— Pourquoi vous en informer ? dit fort sensément madame Leveneur, puisque vous savez son nom et ce qu’il est ?

— C’est juste, madame Leveneur, c’est juste. Pliez et recachetez cette lettre ; n’en privons pas mademoiselle Clarisse.

— Ma mère nous sauve d’un grand danger, dit Manette en emboîtant le judas à sa place.

Il était temps, Leveneur se levait. Il passa juste à l’endroit du plancher que sa fille venait de quitter ; son talon s’appuya sur le judas.

Mais Manette, était déjà au pied de l’échelle ; elle la plia sans bruit, et alla à tâtons, dans l’obscurité, la porter au coin qu’elle occupait, ayant soin de la cacher derrière le chaos de meubles et d’ustensiles qui la masquaient auparavant. Manette gagna ensuite sa chambre, et elle ne dormit pas.


Longtemps avant l’heure accoutumée, Manette descendit au bureau pour mettre les lettres dans les divers sacs de cuir affectés au service de chaque commune. Son premier soin, on le suppose, fut de prendre celle d’Engel-