Page:Gozlan - Balzac chez lui, 1863.djvu/72

Cette page a été validée par deux contributeurs.
56
BALZAC CHEZ LUI.

entier à sa conversation, ou à son monologue, car je n’entendis d’abord que lui ; et lui, Balzac, disant vingt fois au moins par seconde le nom de l’homme côte à côte duquel il marchait. « Non, non ! monsieur Jacquin… disait-il. — C’est de toute impossibilité, monsieur Jacquin. — Vous n’êtes pas raisonnable du tout ! monsieur Jacquin. — Vous n’y songez pas, monsieur Jacquin ! — Ah ! monsieur Jacquin ! — Il faut en rabattre énormément, monsieur Jacquin. — Mais, monsieur Jacquin ! monsieur Jacquin ! où me conduiriez-vous si je vous laissais faire ! — Pas de cela, monsieur Jacquin ! »

Au risque d’écraser une demi-douzaine de Jacquin, j’interrompis Balzac par mon salut et le fait de ma présence.

« Ah ! j’allais chez vous ! me dit-il en me prenant vivement par le bras sans pourtant lâcher celui de M. Jacquin ; cette lettre était pour vous, — il tira une lettre de sa poche, — dans le cas où je ne vous aurais pas rencontré. Vous savez ce qui m’arrive ?

— Je ne sais pas ce qui vous arrive. »

Balzac fut presque fâché de ma réponse ; il croyait déjà tout Paris au courant de l’événement dont il allait m’entretenir.

« Que vous arrive-t-il ? »