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BALZAC CHEZ LUI.

— Mais non ! les cochers passent rarement colonels. Ils meurent cochers. Le mien, par exemple, est un peu vieilli. Sa vue a éveillé mes souvenirs et tous les faits enfouis sous ces souvenirs. Ils sont partis comme une volée de pies cachées dans les avoines, et tout ça s’est mis à parler, à crier, à jacasser sous le plafond de mon cerveau. Bon ! me suis-je dit, il faudra que je m’amuse à dérouler ce morceau de mon passé à M. de Balzac. Il verra s’il y a quelque parti à en tirer.

— Vous dites, reprit Balzac, sans avoir entendu un seul mot des dernières phrases de Vidocq, que ce cocher vous a conduit ici ?

— Oui.

— Et vous n’avez pas pris son numéro ?

— Pourquoi l’aurais-je pris ?

— Ah ! vous êtes un grand…

— Un grand quoi ?…

— Tout ce qu’il vous plaira.

— Pourquoi aurais-je pris son numéro ?… j’ai gardé le fiacre.

— Vous l’avez gardé ?

— Oui, il doit me ramener à Paris.

— Il est donc dans la rue Basse ?

— À votre porte.

— Obligez-moi, je vous prie, dit Balzac à madame