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BALZAC CHEZ LUI.

éveillé au moment où nous allions exécuter notre plan. Ce moment était venu.

« Mais nous voilà réunis tous les quatre dans la cour de la préfecture, les deux femmes, moi et mon agent. Je jugeai prudent que la comtesse et sa femme de chambre n’allassent pas plus loin. Je les priai de ne pas franchir la grande porte, celle qui ouvre de biais sur la rue de Jérusalem. Je les engageai à nous attendre dans la loge du concierge, et à ne pas s’effrayer si nous ne revenions pas les chercher aussitôt qu’elles le désireraient et que nous le désirions nous-mêmes. La part de l’inconnu est si illimitée dans toutes les affaires humaines ! L’inconnu pour moi et mon agent, c’était toujours l’importante question de savoir si le cocher veillait ou dormait.

« Nous quittâmes ensuite ces dames et nous filâmes le long des murs de la rue de Jérusalem pour gagner le quai des Orfévres. À quelques pas de la petite rue de Nazareth, qui ouvre dans la rue même de Jérusalem, nous fûmes arrêtés net par la plus abominable des contrariétés, quoique redoutée, quoique prévue.

— Qu’était-ce donc ?

— Nous entendîmes fredonner une chanson.

— Le cocher ne dormait pas ! dit Balzac, et nous dîmes tous avec lui.