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BALZAC CHEZ LUI.

moi… Oh ! c’est horrible et terrible, car, en ce moment, je suis forcée de penser à ma réputation, à mon honneur, à cet insupportable honneur du monde, ce monde qui va tout savoir ; forcée de penser à l’honneur de mon mari quand je voudrais être tout entière à ma douleur, à mes larmes, à ce jeune homme aimé, tant aimé, à lui seul, pour le garder, l’emporter bien loin, l’ensevelir, vivre de sa mort comme j’ai vécu de sa vie pendant six mois que je l’ai aimé. Mais il ne s’agit pas de cela, dit la comtesse d’un autre accent en rentrant ses larmes, en comprimant ses sanglots ; il ne s’agit pas de cela ; non ! J’ai, je vous l’ai dit, un mort dans ma voiture : que faut-il que j’en fasse ? Il n’y a que vous au monde pour me tirer de là. — Et comment, madame, comment ? Vous avez trop compté sur mes ressources, qui ne sont pas infinies…, et puis, pour un cas aussi extraordinaire… quel moyen ? Il ne s’est jamais offert à moi rien de pareil, rien qui ressemblât… » La comtesse s’était levée. « Il faut pourtant que vous me sauviez, dit-elle, mettant l’autorité de la femme puissante de moitié dans l’autorité de la femme qui implorait ; c’est indispensable. Je ne sors pas d’ici que vous n’ayez imaginé quelque chose… Vous avez mille choses, vous autres de la police, pour… — Erreur commune, madame, mais grande et réelle