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BALZAC CHEZ LUI.

Il ne faut pas croire que son prodigieux talent et son immense popularité le missent à l’abri des trahisons intimes de la maison. Il avait là de bons amis qui le démolissaient avec bonheur auprès des chefs. La bonne, l’adorable madame de Girardin n’était pas toujours assez puissante elle-même pour soutenir le crédit ébranlé de Balzac, maintenir l’autorité de son nom et faire prévaloir sur d’honorables eunuques la virilité de ses belles créations. Le ver à soie qui filait sa trame d’or avait ses araignées qui prétendaient filer aussi. On trouvait l’auteur du Lis dans la Vallée trop diffus, trop filandreux, anatomiste sans mesure, tapissier en diable, commissaire-priseur à l’excès, jamais assez dramatique, tirant tant qu’il pouvait au volume ; enfin les abonnés des départements se plaignaient, et quand l’abonné se plaint, il faut s’incliner, mieux encore, se mettre à genoux, rouler sa tête dans la poussière, obéir. Il n’était que trop vrai cette fois, cependant, que l’abonné de Saint-Jean-de-Coq-en-Brie-sous-Bois et celui de Saint-Paul-en-Jarret avaient réclamé contre le roman de Balzac en voie de publication : les Paysans. Ils menaçaient de cesser leur abonnement si l’on continuait à leur donner, par tranches quotidiennes, ce fastidieux roman de M. de Balzac auquel ils ne comprenaient rien du