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BALZAC CHEZ LUI.

cheval ! » n’en répétait pas moins Balzac. « Quel horrible écart de la civilisation retournant à l’anthropophagie par l’hippophagie ! Aujourd’hui, on mange le cheval, demain on mangera le cavalier. Un repas n’est plus séparé de l’autre que par l’épaisseur de la selle.

— Nous vendons bien autre chose que sa chair, » reprit l’homme à la peau de mouton tournée en dedans.

— Que vendez-vous encore ?

— Eh bien ! et la peau, et les crins, et les os, et les boyaux, et les sabots du cheval ! croyez-vous que tout cela soit perdu ?

— Oui, je sais, dit Balzac, je sais comme tout le monde, que vous vendez la peau de cheval aux corroyeurs, qui la passent ensuite, après diverses préparations, aux cordonniers, aux selliers, aux layetiers…

— Et les os ?

— Oui, avec les os on fait des boutons.

— Et du sucre ! monsieur, du sucre ! Avec les os de ce cheval que nous allons abattre sous vos yeux, on clarifiera la semaine prochaine le sucre que vous ferez fondre dans votre café. »