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BALZAC CHEZ LUI.

de délabrement, de fluidité ici, de boue noire plus loin ; elle nous causa une si forte appréhension à l’affronter, elle nous inspira une si vive et si universelle horreur, que nos pieds se crispèrent, et qu’une terreur commune nous arrêta sur place.

En général habile, M. Brissot-Thivars comprit la démoralisation de son armée. Il chercha aussitôt à en remonter l’esprit par ces mots : « Dans un petit quart d’heure, nous serons arrivés, mes chers amis ; mais je ne tarderai pas plus longtemps, mais je n’attendrai pas la fin de ce quart d’heure pour vous dire la surprise qui vous est réservée au milieu de toutes les surprises qu’on prépare pour vous. — Quelle est cette surprise ? demanda Balzac d’un ton qui voulait dire : Si elle n’est pas de mon goût, je n’irai pas plus loin. — Voilà l’emplacement où l’on représente, reprit M. Brissot-Thivars, les combats d’animaux. — Très-bien, je le connais, dit Balzac ; d’ailleurs, nous le connaissons tous ; continuez. — Hier, un des chevaux de lord Egerton a été étranglé par les chiens de l’établissement dans une lutte des plus émouvantes. — Ensuite ? — Ensuite ce cheval étranglé a été porté à Montfaucon, et il a été mis de côté pour vous, d’après mes ordres, pour vous seuls ! — Est-ce que nous allons le manger ? s’informa Balzac.