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BALZAC CHEZ LUI.

destinée à la conduire à Palerme, devait faire voile dans deux ou trois jours, et l’on savait que le général Bugeaud, son rigide gardien à Blaye, ne la quitterait qu’à l’arrivée même au port de destination. Quoiqu’il y eût beaucoup d’opinions hostiles au gouvernement de Louis-Philippe, ce jour-là, dans le salon où je me trouvais, et aussi beaucoup de républicains qui commençaient à s’entendre tacitement avec les partisans du gouvernement déchu, afin d’être plus forts les uns par les autres pour renverser la dynastie fondée en 1830, aucune fraction présente ne me paraissait bien disposée en faveur de la duchesse de Berri. L’admiration d’abord ressentie pour la princesse quand elle traversait les halliers épineux, les plaines, les tourbières et les marais de la Vendée, que couvraient des milliers de soldats lancés à sa poursuite, cette admiration s’était beaucoup refroidie depuis l’aveu officiel de sa grossesse, bien que parfaitement expliquée et légitimée par son mariage avec le comte Hector Luchesi Palli. Mais elle était dépoétisée ; les rayons de l’auréole s’étaient détachés de son front. Une histoire grandiose à son début, magnifique au milieu, se terminait par un roman presque bourgeois ; une insurrection formidable finissait par une déclaration de paternité à la mairie.