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BALZAC CHEZ LUI.

du moins en bon chemin, rapporterait beaucoup à qui saurait la saisir par les ailes.

C’est à ces réunions hebdomadaires que je rencontrai et que je vis souvent Béranger qui ne publiait déjà plus de chansons, mais qui était toujours, et plus que jamais peut-être, le fin, l’intarissable, le délicieux causeur du dessert et du coin du feu ; de Latouche, qui apportait ses poches pleines de mots ciselés, polis, damasquinés, mais damasquinés, polis et ciselés à froid comme les poignards byzantins, et avec lesquels il égorgeait et tuait, en riant, après le café et la liqueur ; Brissot-Thivars, excellent homme, cœur d’or, esprit de feu, tête encyclopédique fondue à la Diderot, homme de bien, aimé et honoré de tous, passionné pour la salubrité publique, dont il venait d’être nommé inspecteur, comme on se serait passionné pour la musique ou pour la poésie ; parlant constamment de la salubrité publique ; ramenant toutes les questions, soit morales, soit littéraires, soit politiques, à sa chère salubrité publique, laquelle, il est juste de le dire, dut de grands et d’utiles progrès à sa rare et patriotique initiative ; le docteur Gentil, attaché à cette époque, comme homme de lettres, à la maison Béchet ; Louis Raybaud, fort loin à ce moment-là de songer à la députation des Bouches-du-