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BALZAC CHEZ LUI.

acceptée à la place de la grande actrice, trop grande, prétendit l’habile directeur de l’Odéon, pour ne pas faire attendre du rôle des effets dramatiques qu’il n’était pas entré dans le sage et vaste esprit de l’auteur de lui imposer. « Il y aurait eu péril, ajouta-t-il, à laisser espérer au public ce qu’aucun effort humain n’aurait réalisé, si madame Dorval eût couvert l’affiche de l’éclat éblouissant de son nom. Les grands noms engagent. Comment tenir un tel engagement ? D’ailleurs, ajouta Lireux en modérant l’accent de sa parole vibrante, il faut de la royauté, de la noblesse, beaucoup de noblesse, vous le comprenez mieux que personne, monsieur de Balzac, pour jouer le rôle de Faustina Brancadori. Brancadori ! quel nom exigeant ! Or, entre nous, madame Dorval, comme actrice, n’est pas née sur les marches du trône ; elle rend bien, sans nul doute, les sentiments vrais, bourgeois, les sentiments à pied, mais quand il faut parler en reine et le sceptre à la main… non !… Mademoiselle Héléna Gaussin est l’actrice qui convient à votre rôle ; ne sortons pas de là. Les plus belles épaules de Paris !

— Elle n’est pas très-connue.

— En France, c’est possible, mais en Suisse ! Parcourez la Suisse, et vous verrez.

— Elle vient de la Suisse ?