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LIVRE SECOND.

SECOND.
LIVRE
Ennemis du Soleil & de l’alme lumiere.
O Dieux qu’ils voudroient bien reuoir noftre clarté,
Parmy les durs trauaux & l’afpre pauureté !
Mais le Ciel y refifte à leurs cris implacable,
Les entrauant du Stix palus non repaffable :
Et le trouble Acheron d’vn cours neuf fois retors)
A leur retour encor trenche tous fes abbors.
Vne pleine eft auprés vaguement efpandue,
Qui découure à plein fond fon ombreufe eftenduë :
Lenom de Champ de pleurs on luy donne Là-bas.
Car ceux-là que l’Amour precipite au trépas,
S’y cachent à l’abry tracaffant mainte fente
D’vne foreft de myrthe en tout temps verdiffante :
Et fouffrent les douleurs qui les gehennoient iadis,
De paix au cercueil mefme à iamais interdicts.
Dans les fombres vergers de ce funefte Afyle,
Il void Phedre, Procris & la trifte Eriphylë,
Qui d’vn gefte honteux defigne auec la main,
Le coup qu’vn fils cruel luy porta dans le fein.
Pafiphaé s’y void, Euadne eft aupres d’elle,
Laodamie affifte efpoufe trop fidelle :
Conéc autrefois fille & depuis demoyſeau,
Derechef fille encore augmente ce troupeau.
Dans ces grandes forefts Didon la belle Reyne,
La playe ouuerte & fraifche à l’efcart fe proumene.
Mais fi toft que le Prince approchant de plus prés,
De la Reyne en l’obfcur eut remarqué les traits,
Tout ainfi que par fois au retour de la Lune,
L’œil void ou penfe voir, vne lumiere brune,
Entreluyfant aux yeux dans le nouueau Croiffant,
Sous les plys d’vn nuage à peine paroiffant :
Lors pleurant d’amour tendre il luy dit ces parolles.
Donc les bruits de ta mort ne furent point friuolles :
Donc, ô
pauure Didon, yn farouche defdain,
Contre ta ieune vie auoit armé ta main/SE — mero
Etie caufay, dolent : vn mal-heur fi funeſte !
SSS ff
Ꮪ Ꮪ Ꮪ ᏝᏝ Ꭵ
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