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LES ADVIS.

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LES AD V I S.
N
Et fon abboy tranchant ces Royaumes eftonne.
Sur le ventre il s’eftend largement euafé,
Dans yn Antre effroyable au riuage oppoſé.
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La Vierge qui le void heriffer fes trois teftes,
De gros ferpens affreux fifflans à hautes creftes ;
Vn gafteau fommeilleux luy iette promptement,
Detrempé dans le miel meflé d’vn ius charmant.
Ses trois goffers ouurant d’vne ardeur affamée.
Il engloutit en l’air la galette charmée,
Le Monftre toftapres au fomme a fuccombé,
Son puiffant dos matté croullant eft retombé :
Et l’enorme largeur
Sur la terre efpandulefchine & du ventre,
emplit le fein de l’Antre.
Cerbere enfeuely dans ce flatteur repas,
D’vn brufque eflancement le Roy gaigne le pas :
Et fans garde faifit ce tenebreux riuage,
Qui iamais au retour ne prefte le paffàge.
Approchant du pourpris il oid au premier fueil,
Les hauts cris gemiffans, les triftes voix de dueil,
Des enfans efpleurez qu’vne chanfe cruelle
Séure en mefme momemt de vie & de mammelle,
Les priuant des beaux rais du celeſte flambeau,
Pourietter leurtendreffe en l’horreur du tombeau.
Ceux qu’on a fait mourir par iniuftefentence,
Logent pres des enfans leur plaintiue innocence.
N’y n’obtiennent ces rangs fans égard ou fans loy :
Car Minos iufte Iuge & venerable Roy,
Affemblant en confeil la Brigade infernalle,
Des aduis de chaqu’vn remplit l’vrne fatalle :
Pour en tirer apres les bons ou mauuais forts,
Selon qu’il s’efclaircit du merite des morts.
Le lieu proche eft remply de ces Ames dolentes,
Dont le cœeur penetré de douleurs trop cuyſantes,
Par vn fier defefpoir violans leurs beaux iours,
De leur vie incoulpable ont abregé le cours.
Et refpandu leur fang d’vne fureur meurtriere,
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