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UN CŒUR VIRGINAL

dèrent, désirant parler, mais ne trouvèrent pas de paroles. Alors leurs bouches se joignirent encore. M. Hervart pressait doucement le sein de Rose et une petite main serrait son autre main. Le moment était périlleux. M. Hervart le sentit et voulut mettre fin à ce contact. Mais la petite main serra plus étroitement sa main, cependant qu’un genou, s’ouvrant d’un mouvement légèrement convulsif, venait battre sa jambe. L’arc, à ce contact, se détendit. Les mains retombèrent, les lèvres se déjoignirent et, pour la première fois après un baiser, Rose ferma les yeux.

M. Hervart sentit une douleur à la nuque.

Il se souvint alors d’une saison d’amour platonique qu’il avait passée à Versailles avec une femme vertueuse, et il eut peur, car cette passion à baisers légers et à serrements de mains l’avait plus ravagé que les plus violents excès.

« Que vais-je devenir ? Car maintenant, c’est du platonisme aigu, avec ses manifestations les plus décisives. Tout ou rien ! Autrement, je suis perdu. »