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UN CŒUR VIRGINAL

mant, se dévêtait sitôt entrée, comme une folle, en excitant son amant à une pareille et prompte nudité. Une autre semblait au contraire n’être venue que pour une visite amicale, et il fallait de réelles diplomaties pour obtenir d’elle ce qu’elle désirait très fort pourtant, au fond de son cœur. Entre ces deux-là, beaucoup de nuances se disposaient. La plupart aimaient à se livrer peu à peu, à jouer longuement avec leur pudeur et avec leur désir, à contempler la lutte des deux bêtes divines. M. Hervart croyait connaître assez bien les femmes ; il savait que celle qui se laisse toucher se laissera prendre toute.

« Une femme, songeait-il, qui aurait été aussi familière que Rose, et même beaucoup moins, serait femme donnée. Peut-être me ferait-elle attendre encore quelques jours, en maîtrisant son feu, jusqu’à l’heure propice des abandons complets, mais elle m’appartiendrait, laisserait ses yeux l’avouer, ses lèvres le dire. Il me semble même qu’une telle femme serait disposée à provoquer la venue de l’heure agréable, si je n’avais pas l’adresse de la préparer moi-même. Rose,